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La maison, au centre de la vie

Entre les Français et la « maison » (vocable générique qui comprend aussi bien les logements individuels que collectifs), c’est une grande et durable histoire d’amour. Le foyer est en effet au centre de leur vie. Ils y passent d’abord l’essentiel de leur temps : 18 h 39 par jour , soit plus de dix heures si l’on enlève celles consacrées au sommeil. Ils y consacrent aussi la plus forte part de leur budget disponible : 24% , le logement étant devenu le plus gros poste depuis le début des années 1990). La crise économique et sociale qui sévit depuis près d’une décennie n’a fait que renforcer la place du foyer.

Maison bulle, maison confort

La maison est ainsi considérée comme une bulle, un abri, un cocon, dans lequel les occupants se sentent protégés des risques et menaces extérieurs, où ils peuvent trouver la sécurité et l’harmonie. Mais aussi pratiquer des activités, de plus en plus nombreuses à être pratiquées à domicile : travail, loisirs, information, administration, convivialité.… On peut expliquer et résumer cet attachement au foyer par une formule : lorsque c’est « dur dehors », il faut que ce soit « doux dedans ».

Cet investissement à la fois affectif, temporel et financier dans le logement a des conséquences spectaculaires. 99,5% de logements sont aujourd’hui pourvus de « tout le confort » contre seulement 44% en 1973. La superficie moyenne disponible est passée dans le même temps de 72m² à 91 m² ; elle est de 112 m² en individuel. Il faut noter que dans le même temps, le nombre de personnes vivant dans un même logement a fortement diminué : 2,3 contre 2,9 en 1973 (2,5 en individuel), de sorte que la superficie moyenne par personne est passée de 25 m² à 40,3 m² (45 m² en individuel). Et seuls 6% des ménages se déclarent insatisfaits de leur logement (15% en 1973)

Un rêve intact, mais des attentes nouvelles

Les attentes en matière de logement sont donc particulièrement fortes. Le rêve premier reste celui de la maison individuelle ; a-t-on déjà vu un enfant dessiner spontanément un appartement dans un immeuble plutôt qu’une maison avec sa cheminée et son jardin ? Ce rêve est réalisé par 58% des ménages, malgré la poursuite de l’urbanisation du territoire, compensée en partie par la montée de la « néoruralité » (des ménages déçus de la vie urbaine, qui cherchent de meilleures conditions de vie dans les zones rurales ou semi-rurales, sans pour autant sacrifier leur confort).

Le logement doit d’abord satisfaire des besoins et fonctions primaires : alimentation ; repos ; hygiène ; confort (chaleur, lumière…) ; stockage ; sécurité ; proximité avec les emplois, les commerces, les services ; les loisirs ; facilité d’entretien…

Mais d’autres fonctions se sont développées au fil des années, avec l’évolution de la société : communication ; accessibilité ; travail ; gestion du ménage ; développement personnel… Les progrès du numérique ont aussi permis le travail à domicile, l’automatisation de certaines tâches, leur commande à distance. Ils ont multiplié les moyens de communiquer, de s’informer ou de se former. Avec le développement de l’homo zappens (un individu dont la vie est davantage marquée par les changements que par la continuité), la demande va aujourd’hui vers une plus grande flexibilité, notamment en matière d’aménagement de l’espace et de décoration. Il faut pouvoir reconfigurer le logement en fonction des situations ou des humeurs, et non plus seulement des phases traditionnelles du cycle de vie.

Enfin, la prise de conscience environnementale a donné lieu à ’une demande croissante d’efficacité énergétique, pour dépenser moins et se montrer plus responsable. Le logement du futur sera à la fois éco-logis, écolo-gis, techno-logis. Mais aussi ego-logis, dans la mesure où il devra satisfaire les besoins et envies de chacun de ses occupants.

Défis et opportunités pour les professionnels

Les constructeurs et autres intervenants dans la chaîne de l’habitat doivent répondre à des attentes croissantes de considération, information, personnalisation, confiance, efficacité, accompagnement. Le tout dans un contexte de recherche du « juste prix », leurs clients disposant de nombreux moyens de comparaison des offres.

Pour y parvenir, ils peuvent s’appuyer sur la dimension relationnelle, plus fondamentale dans le domaine de l’habitat que dans tout autre. Ils se trouvent en effet face à des clients en recherche d’empathie, et de plus en plus désireux de participer au processus de réalisation de leur rêve. Les professionnels devront ainsi intégrer totalement les acquéreurs dans les projets et les choix, de l’amont à l’aval. Ils pourront aussi utiliser avec profit les témoignages et conseils d’autres clients. C’est en effet à leurs pairs que les consommateurs, et a fortiori les candidats à la construction d’une maison cherchent d’abord à s’adresser face à un problème. Car ils se sont posé les mêmes questions qu’eux avant de trouver des réponses, parlent le même langage et ne peuvent être suspectés de vouloir leur « vendre » quelque chose.

Pour épouser les tendances (lourdes) qui sont à l’œuvre, les professionnels devront aussi rendre les espaces intérieurs plus modulables et favoriser des changements de décor (cloisons mobiles, éclairages, écrans intégrés…). Ils pourront aussi proposer (dans les lotissements en particulier) des espaces de de mutualisation d’équipements et de services, qui sont des prétextes à l’échange et à la convivialité. Il leur faudra enfin garantir la qualité environnementale globale de l’habitat, gage d’économie sur les charges inhérentes au logement ainsi que de contribution citoyenne à l’avenir de la planète.

C’est ainsi qu’ils pourront développer et entretenir une relation de confiance avec les clients, qui deviendront eux-mêmes leurs ambassadeurs sur les forums et les réseaux sociaux. Comme le dit un proverbe indien, « Ce ne sont pas les pierres qui bâtissent les maisons, mais ceux qui les habitent ».

Gérard Mermet, pour la revue La preuve par neuf de GrDF, septembre 2015